Alexandra TOLSTOY, 4 amazones et la Route de la Soie.

Après Rachel DORANGE, Linde v. KLINCKOWSTROM, Friedel SCHUMANN, Marion v. DONHOFF, les passe-frontières en Europe, reprenons la direction de l'Orient que nous a indiquée Laurence BOUGAULT.

A la frontière entre la Perse et l'Empire russe, en 1889, nous avions abandonné le hussard Jean de PONTAVES, cité en miroir pour l'épopée "Iran-Paris", de Laurence BOUGAULT de 2009.

Pontavès, à nouveau, nous guidera vers Merv au Turkménistan d'aujourd'hui où nous retrouverons quatre amazones "so british" à cheval (et à chameau) sur les traces de Marco Polo ... et de bien d'autres héros sur la mythique Route de la Soie, direction X'ian, en Chine.

L'une d'entre elles, dont le grand oncle était un romancier russe célèbre et néanmoins cavalier, ayant pratiqué et écrit "Les Cosaques" inspiré de ses années de petite guerre dans le Caucase et puis développé la dialectique "Guerre et Paix" a un patronyme "vendeur" en termes de mercatique !

La "comtesse" Alexandra TOLSTOY a publié "The last secret of the Silk Road" en 2003. Ainsi, en relisant les récits de Laurence BOUGAULT, de Jean de PONTAVES puis de Alexandra TOLSTOY nous aurons un parcours qui rejoignait l'Empire romain à l'Empire du milieu et nous aurons l'occasion d'évoquer les figures historiques et légendaires d'Alexandre le Grand, de Gengis Khan, de Tamerlan et autres cavaliers envahisseurs qui suivaient les traces possibles des premiers cavaliers, entre deux Océans, il y a plus de 5 000ans, alors que Googlearth et le GPS n'existaient même pas. Certains se guidaient simplement vers le soleil à l'aube ou, d'autres, vers le soleil à l'aurore !

Une collègue ITA, française, Magali PAVIN, en a presque fait l'aller, du Couchant au Levant, puis retour ! J'essaie d'en savoir plus aux confins de l'Ardèche et de la Drôme !

Allez, en avant ! "A cheval !", "Ma* jong !" comme on dit à X'ian.

* Ma = cheval en chinois.

Alexandra TOLSTOY, 4 amazones et la Route de la Soie. Tolsto10

Vous pouvez le trouver dans vos bonnes librairies (pas de pub pour l' "amazonie" !)

Quelques bribes pour Alexandra TOLSTOY

ET, à propos de la ROUTE DE LA SOIE

Rappel (voire le post concernant Laurence BOUGAULT, amazone de la paix, sur e même site)

Jean Pontavès de Sabran raconte son arrivée à Méched après 10 jours de raids depuis Téhéran :

5 avril 1888 à Méched (Khoraçan, Perse)

"Après une lessive générale un peu soignée, nous allons rendre visite à notre hôte qui est déjà venu s'informer de l'état de nos précieuses santés.

Le prince Mirza-Khérim-Khan se montre vis à vis de nous tout aussi affable que son fils... âgé, très pâle et maladif...Il porte le costume persan...il est extrêmement flatté de notre venue, mais dit que Méched nous intéressera fort peu, - l'entrée des mosquées, des bazars et autres lieux publics étant interdite aux chrétiens.

Néanmoins, il nous accompagnera lui-même partout où il sera possible de nous conduire, afin de nous éviter toute insulte de la part de la population...

... arrive le général Gasteiger-Khan, ingénieur en chef de sa Majesté le chah... uniforme autrichien composite et ... verbe haut.... Tyrolien... parle... français...

Nous sommes vite les meilleurs amis du monde.

... Il nous confirme que les Méchédis sont de fieffés fanatiques ; que nous partirons bredouilles ;

... il y a six mois, atteint d'une maladie de gorge extrêmement grave, il a dû se barricader et armer ses serviteurs, pour empêcher qu'on ne le traînât hors des murs de la ville pour l'y laisser "crever comme un chien", ainsi que les philanthropiques schiites ont coutume d'agir vis à vis de tout chrétien moribond...Il nous conseille de quitter le plus tôt possible ce pays barbare...

... nous faisons mander Gaffar-beg séance tenante , afin de lui donner des ordres concernant la formation de notre caravane...

Cet intelligent serviteur nous conte qu'ayant prévu que nous ne ferions pas long feu à Méched, et sachant notre itinéraire, il s'est déjà occupé de trouver des animaux. Il n'a d'ailleurs pas réussi.

Les Méchédis prétendent que les Youmoutes ravagent présentement le district de Koutschan, où nous devons nous rendre; que nous serons pillés ou tué et que leurs chevaux seront pris. En conséquence, ils se refusent à traiter avec nous.

... nous lui octroyons l'ordre d'avoir à s'ingénier à partir dans trois jours, pour Askâbad, dussions nous voyager à dos de chameaux..."

8 avril 1888 à Méched (Perse) Pontavès reprend son récit :

"A notre réveil, on nous apporte de la part du général Mac Leane, un panier d'excellentes provisions de toutes sortes : charcuterie, whiskey, cognac, fromages, conserves, etc.

De plus, on nous fait savoir que le général est parti, dès le lever du soleil avec toute sa maison, sur la route que nous allons tenir, et qu'il nous attendra pour déjeuner à environ 12 kilomètres (2 farsaks de Méched)

On ne saurait être plus gentleman.

Donc à huit heures, nous serrons une dernière fois et de grand cœur la main de notre hôte, et celle de Son Excellence Gasteiger-Khan.

Puis nous montons, avec Moukhtar-Khan-Nassir-Pékow, dans le phaéton de son père, qui doit nous conduire au rendez-vous du général.

Gaffar-beg viendra nous rejoindre dans deux heures, avec nos animaux.

Dès que nous sommes hors du faubourg de la ville, Moukhtar-Khan-Nassir-Pékow nous fait ses adieux et montant sur son arabe qu'un goulan a tenu en main jusque-là, il rentre à Méched dans un tourbillon de poussière, nous laissant seuls aller à notre rendez-vous..."

MAIS, que font ces patronymes, britannique (avant le référendum écossais ?)"Mac Lean", et russe "Pékow" dans ces contrées turcomanes du Khorasan ?

Un petit rappel historique est nécessaire :

LE GRAND JEU

et Alexandra TOLSTOY, britannique de passeport, nous expliquera plus tard que ce "Grand Jeu" est parti de sa raison de voyager dans ces contrées ...

PONTAVES reprend :

"... Grâce à la route nationale (!) de notre ami, le général-ingénieur, nous joignons bientôt le camp du général Mac-Leane.

Au revers d'un talus, à l'ombre des saules grêles, le couvert est déjà disposé sur des tapis et des feutres épais, qu'une blanche nappe recouvre.

Au soleil, étincellent l'argenterie et les cristaux ; sous le vent les fourneaux font entendre leur appétissante musique; de toutes parts des serviteurs bronzés vont et viennent, respectueusement empressés ; et tout autour du camp, les chevaux, attachés aux piquets de fer, hennissent joyeusement..."

"L'un des meilleurs souvenirs de mon voyage sera certainement ce lunch d'adieu que préside la cordialité la plus parfaite, et où les toasts se croisent de part et d'autre, également ardents et sincères, - comme il convient entre sentinelles perdues momentanément réunies."

"...Et même quand nos misérables chevaux nous emportent tout au loin dans la plaine sauvage, où, pour nous, l'inconnu va reprendre plus âpre et plus sévère peut-être que jamais, sans cesse nos mouchoirs s'agitent en signe de communion dernière, jusqu'à ce que l'invisible poudre d'opale de l'éloignement nous isole de toutes choses amies.

Le terrain plat- où nous cheminons est parsemé de cimetières et de trous de khanots.

Par-ci, par-là, des champs d'opium, d'orge, de trèfle : dans les bas, quelques saules ou des peupliers, et un peu partout, beaucoup de huppes."

" Nous n'allons plus qu'au pas : le pas étant la seule allure possible, avec une ménagerie aussi hétéroclite que celle dont je suis momentanément le directeur, et dont voici la composition : deux haridelles où nous trônons; trois mules étiques, l'une pour Gaffar-beg, la seconde pour Joseph David et la troisième pour notre tcharvadar (chef de caravane); enfin deux bourriquets pour le restant de nos bagages."

"Notre tcharvadar est un petit marchand d'Astrakan. Il n'a jamais suivi cette route, mais il ne désespère pas de nous conduire quand même à Askâbad : Insh'Allah !"

"En guise de fouet, il porte à la ceinture une corde terminée par une chaîne. Dès que cette chaîne s'agite, les sept queues des quadrupèdes de ma ménagerie ambulante en font autant et le pas s'acccélère un peu ; la chaîne retombe-t-elle, que le calme plat reprend, sans que rien d'important vienne distraire la monotonie de notre marche.

A ciq heures du soir nous arrivons dans le pauvre village de Gunâbad sept farsaks (42 kilomètres).

...

Nous dînons d'un agneau que nous avons payé la valeur de un franc soixante dix centimes, sans marchander. Si la vie est triste ici, elle n'est évidemment pas chère."

Pour en savoir plus sur le point de départ : Mashhad

9 avril 1888 Gunâbad- Seîdâbad

"Dès sept heures du matin nous repartons.

Terrain inculte, en beaucoup d'endroits, salé ; de très loin en très loin, quelques amas de boue plus clairs qui sont des villages.

Ici les indigènes sont plus bronzés, ont les yeux moins beaux, les turbans plus bas, les jupes plus longues.

Aucun incident, sauf l'ennui indicible que nous cause la condamnation au pas à perpétuité.

A deux heures un quart nous arrivos à Seïdclar ou Seïdâbad : sept farsaks (42 kilomètres).

Toujours même installation déplorable, et nourriture à l'unisson.

Quelques études de mœurs insignifiantes, le beau sexe nous tenant absolument rigueur."

10 avril 1888, Seidâbad-Djavârabad.

"Nous levons le camp avec le jour.

Vers dix heures, nous faisons halte près d'un puits, pour déjeuner ; mais l'eau est tellement infecte que nous ne pouvons en boire.

Autour de nous, le sol est uniformément duveté de touffes de plantes odoriférantes (yauchan), dont l'odeur rappelle celle de la lavande. parmi ces touffes, beaucoup de tortues jaunes, bariolées de noir. Voilà des sièges tout trouvés, quoiqu'un peu bas de pieds !

A notre gauche, la chaîne des monts Binalud-kih, qui nous avait déjà montré son flanc sud, nous étale présentement son flanc nord tout saupoudré de neige. A droite, mais très loin, les monts Hazar-Madjid dressent leurs cimes bleuâtres, et, entre ces deux remparts, coule une grande plaine fauve à peine ondulée. C'est cette coulée (bassin supérieur du Kashaf-Roud) que nous suivrons jusqu'à Koutschan.

Le village de Djavarâbad, où nous arrivons à deux heures et demie, après avoir parcouru six farsaks (36 kilomètres), est de toute façons digne des précédents.

Nous sommes parqués dans une tanière à moutons."

11 avril 1888, Djavarâbad- Quchan.

"Quand on fut toujours vertueux,
On aime à voir lever l'aurore..."

"Soit, mais le mieux étant l'ennemi du bien, notre vertu commence à nous fatiguer et ce phénomène de la nature à nous lasser extraordinairement..."

11 avril 1888, Djavarâbad- Quchan.

"Quand on fut toujours vertueux,
On aime à voir lever l'aurore..."

"Soit, mais le mieux étant l'ennemi du bien, notre vertu commence à nous fatiguer et ce phénomène de la nature à nous lasser extraordinairement..."

"... Aujourd'hui, le terrain que nous foulons, presque partout cultivé, se hausse vers le nord en se mouvementant pour tout de bon. Les habitants ont l'air d'être moins sauvages et de mieux travailler la terre.

Beaucoup de merles, de pigeons, d'alouettes bilophes... des bandes de lagonys, petits rongeurs jaunes à physionomie de lapin, mais sans oreilles et à courte queue droite, font toutes sortes de singeries, se terrant dès que nous en approchons.

Bientôt le paysage perd de sa primitivité pour s'étoffer, tout en restant toujours fluide, triste, calme. Les approches de Koutschan semblent même une vision biblique.

Entre deux ondulations teintées de neutre, un semis de maisons carrées, basses grises d'où fusent de petites fumées pâles...""

"A gauche, un groupe d'arbres fruitiers roses, sans feuilles.

A droite, côtoyant un naïf ruisseau qui forme trois cascades, de frêles saules vert d'eau ; en arrière, une rangée de peupliers-pinceaux et plus en arrière encore, une petite futaie d'arbres grêles, limpides, follets.

En avant, un âne dort ; près de lui, un enfant étendu montre à l'air son derrière de bronze - et deux femmes, drapées de marron, glissent comme des statues qu'on trainerait..."

"Koutschan, où nous arrivons à dix heures, quatre farsaks (24 kilomètres), est un grand bourg assez semblable à ceux déjà vus. toutefois sa population semble plus vigoureuse, plus remuante, lus gaie : elle paraît donc se trouver très bien du régime féodal qu'elle subit.

... nous arrivons, guidés par un indigène, au logis de Yayabey-Taïrow, pour qui notre hôte de Méched nous a donné des lettres d'introduction.

Yayabey-Taïrow (cousin de Mirza-Khérim-Khan, et comme lui Caucasien) est le plus gros bonnet commercial et le principal notable de Koutschan. C'est un véritable colosse à tous poils, d'une amabilité parfaite.

Après une magistrale bourrasque de compliments, il nous installe dans un appartement parfaitement bien tenu et tendu de belles étoffes brodées...

Nous n'en coucherons pas moins par terre, les lits étant inconnus ici comme partout en Perse..."

"Notre toilette faite, et nos forces réparées, Yayabey-Taïrow nous donne de précieux renseignements concernant e district de Koutschan. de plus, comme il tient à cœur à assurer notre arrivée à Askâbad, et qu'il sait que notre tcharvadar ne connaît pas la route, il nous oblige à accepter un de ses serviteurs en qui il a une confiance absolue...

Nous allons visiter Koutschan... Au retour nous sommes servis... mon voisin, un Persan, mange pour moi,... ne cessant d'émettre des sons hiéroglyphiques du plus ridicule effet, - sous le prétexte de parler français..."

"... je veux dire deux mots de l'importance de Koutschan.

Depuis la création du transcarpien, l'importance stratégique de Koutschan a sensiblement diminué. En effet, Douchak (point extrême est du transcarpien) n'est plus qu'à 150 kilomètres (à vol d'oiseau) de Méched, tandis que la route d'Askâbad à Méched, commandée par Koutschan, mesure 240 kilomètres.

Néanmoins, dans le cas d'un conflit russo-persan, Koutschan reste un point capital à occuper, étant le seul nœud où viennent aboutir les principales routes conduisant à la Transcarpienne en Perse et au Khoraçan..."

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